Pouvons-nous en parler? Devons-nous en parler? Que pouvons-nous dire pour en parler? Que ne devons-nous pas dire? On ne le sait plus! De plus en plus, ce sujet devient tabou.
Voici ce que j'en pense.
En plus d’être devenu une norme sociale, ce chiffre a pris beaucoup trop d’importance, pour la valeur qu’il représente réellement.
Dans un premier temps, je suis d’avis qu’il faut d’abord réduire l'importance qu'on lui porte. Ainsi il faut arrêter de le prendre constamment, arrêter d’en parler constamment, mais il faut aussi arrêter de l'éviter, car tenter de l'éviter à tout prix c'est également y accorder trop d'importance. En effet, si le poids devient comme Voldemort, un chiffre qu'on ne doit jamais aborder, ça devient aussi une problématique. Il faut réapprendre à comprendre ce chiffre et à être en mesure de l’analyser, pour être ensuite capable de le rationnaliser et ne plus le craindre…
La mesure du poids est facile, rapide et accessible, mais sa représentation réelle médicale, est tout sauf facile d’analyse. Elle est complexe et plusieurs composantes doivent être considérées pour être en mesure de bien comprendre sa valeur. C'est pourquoi il faudrait, dans un premier temps, arrêter de prendre cette donnée «à la va-vite», sans y adresser toute la complexité que ce chiffre représente. Dans les faits réels, le poids est une donnée pour mesurer notre charge pondérale sans distinction entre la composition corporelle (os, muscles, eaux, organes etc), la répartition de la masse adipeuse, l’âge, le sexe, l’ethnie, l’histoire pondérale, le mode de vie, les comportements alimentaires, etc. Ainsi, cette valeur à elle seule, n’est pas suffisante pour obtenir une analyse détaillée de l’état de santé d’un individu. Ce n’est qu'une donnée parmi tant d’autres; parmi notre tour de taille, notre tension artérielle, nos battements cardiaques par minutes, notre rapport sanguin, etc. Une valeur qui, comme toutes les autres mentionnées ci-haut, tend à bouger et fluctuer selon différents facteurs et qui, comme toutes les autres, mérite une analyse pour être en mesure de l’interpréter adéquatement.
Malheureusement, elle est beaucoup plus facile à prendre que toutes les autres données, ce qui la rend beaucoup plus accessible. Par contre elle ne nécessite pas moins d’analyse pour en comprendre sa valeur réelle. C’est pourquoi elle devrait être interprétée d'un œil professionnel pour avoir une valeur juste. En effet, lorsque qu’un professionnel de la santé prend cette valeur, celui-ci analyse, oui le chiffre, mais il interprète surtout les grandes variations, les grands changements, il questionne les habitudes qui en sont reliées. Il intègre cette donnée à toutes les autres prises lors du rendez-vous, afin d'en dresser un bilan final. Pensez-y, lorsque vous allez chez le médecin est-ce qu’il ne fait que prendre votre poids et le tour est joué? Non, il y a beaucoup d’autres valeurs qui sont prises! Ce sont toutes ces valeurs, mises ensemble, qui dressent le bilan d’un état de santé d’un individu! Beaucoup plus complexe qu’un chiffre sur une balance, n’est-ce pas? Ainsi, le poids fait partie de nous, il n’est qu’une COMPOSANTE de nous, il n'est pas TOUT ce qu'on représente, il n'en fait que simplement partie. Alors, pourquoi y accorder autant de valeur, si dans les faits réels il n’en n'a que très peu?
D’autre part, son accessibilité, sans précaution dans le public, a transformé cette mesure en norme sociale. Dans la société d’aujourd’hui, on prend son «poids beauté», son «poids social», son «poids santé», toutes des valeurs établies par la société. Ce n’est plus une valeur médicale, c’est une valeur sociale. Cela devient un problème majeur, puisque les personnes qui n’atteignent pas le poids considéré «normal», du moins «socialement normal», font face à d’importants jugements. En effet, la prise pondérale vient toujours et systématiquement avec un jugement. Personne n’est totalement satisfait de la valeur que lui donne sa balance : «c'est beaucoup trop, ce n'est pas assez, j'ai engraissé, j'ai trop maigri, je n’ai pas le chiffre que je voudrais voir, je suis gros(se), etc.». Sans compter que cette donnée devient la valeur que la personne s’attribue, telle une note d’examen ayant comme note de passage : la norme sociale! C’est ainsi que cette donnée, jamais satisfaisante, devient une valeur déterminante dans le processus d’acceptation de son corps. Il faut arriver à prendre son poids sans y adresser un jugement, une note de passage ou une pression sociale.
Le poids n'est donc qu'une donnée de faible valeur qui demande une meilleure analyse que le simple chiffre affiché sur la balance. Si vous n'arrivez pas bien comprendre ce que représente ce chiffre, je vous suggère d'arrêter de le prendre par vous-même. Faites-le accompagné d’un professionnel, il sera en mesure de l'interpréter de la bonne façon. De plus, si vous n’arrivez pas à utiliser ce chiffre de la bonne façon, c'est à dire en l'utilisant pour vous juger ou juger autrui ou que cette valeur représente un vrai démon pour vous, faites-vous accompagner par un professionnel qualifié pour vous aider à mieux comprendre ce que ce chiffre représente, pour arriver à déstigmatiser cette mesure.
Finalement, à mon humble avis, plutôt que d’occuper vos pensées à vouloir faire descendre un chiffre, de très faible valeur, sur une balance, vous devriez plutôt vous demander ce que vous pouvez faire pour vous sentir mieux dans votre peau. Ainsi, vous comprendrez que, pour atteindre vos objectifs santés, il demeure encore plus important de collaborer avec la relation que vous entretenez avec vos habitudes alimentaires et sportives, avec le développement de votre image corporelle et de vos habitudes de vie, plutôt qu’avec le chiffre qui apparait sur votre pèse-personne!
Alexanne Bolduc, B.Sc., Kinésiologue
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Références :
https://ebook.ecog-obesity.eu/fr/courbes-de-croissance-et-composition-corporelle/histoire-et-signification-de-lindice-de-corpulence-interet-des-autres-mesures-anthropometriques/
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